LES GISEMENTS DE VERTEBRES FOSSILES DE L’OLIGOCENE DU TARN (STAMPIEN à CHATTIEN)
HISTORIQUE DES DECOUVERTES ET REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
GISEMENTS DES MOLASSES SITUEES A L'OUEST DE LA GRESIGNE, ENTRE LES VALLES DU TARN ET DU TESCOUNNET (MP25 à 30)
La Sauzière-Saint-Jean
C’est dans « les sables et les grès » de la Sauzière, au lieu-dit la Métairie-Haute, que Caraven-Cachen découvre vers 1893 « une mâchoire d’Anthracotherium magnum et A. minutum » (Caraven-Cachin, 1898, p. 408).
Ses collections du musée d’Albi renferment effectivement la partie antérieure d’un crâne écrasé qui a servi à F. Roman (1911, pl III, fig. 1-2)(ci-dessous) à la description l’espèce nouvelle d’Aceratherium albigense.
Il y trouve également des prémolaires fragmentées d’un autre individu, deux canines dont l’une est figurée (pl III, fig. 3). La mâchoire type et une canine paratypique figurent toujours dans ses collections du musée d’Albi (étiquetées de la main de Roman)(ci-dessous), avec des écailles de tortues (n° 48)(figuré en bas de page) et des dents de crocodiles (n° 397) (à ce jour inédites).
Des molaires et des pré-molaires d’Aceratherium albigense (provenant de la collection d’Albi ?) ont été retrouvées par Richard (1946, p. 174) dans les collections de la Facultés des Sciences de Lyon.
Le fossile sera placé dans le genre Protacerathium (en 1924) puis dans le genre Molassitherium (Becker et al., 2013).
Paysage des molasses des environs de la Sauzière-Saint-Jean
Par son altitude élevée, 220 m, le gisement est situé par Roman (1911), par Richard (1946) et par Astre (1964) dans le Stampien supérieur. Muratet et Cavelier (1992) le placent dans le Chattien inférieur, au niveau de la biozone MP25.
Espèce nouvelle du gisement :
Molassitherium albigense (ROMAN, 1911), p. 28-31, fig. 6, pl. III, fig. 1, 1 a, 1 b, 2, 3. Musée d'Albi. Une portion antérieure de crâne (type) avec la dentition supérieure ; une incisive (paratype) ; des débris de dents isolées ; deux canines, recueillie par Caraven-Cachin à la Métairie-Haute, La Sauzière.
En haut : figures originales de Roman, 1911, pl. III, fig. 1a, b.
Au milieu, à droite : figure originale de l'incisive paratype de M. albigense de Roman, 1911, pl. III, fig. 3
Au milieu, à gauche : exemplaire original de l'incisive paratype.
Collection Caraven-Cachin du musée d'Albi. Etiquette écrite de la main de Roman.
En bas : photo de l'original du crâne du musée d'Albi
Salvagnac
C’est Cabié (1893, p. 23) qui nous apprends que Caraven-Cachin à découvert « l’Anthracotherium magnum » à Salvagnac (Messager de Toulouse, 19 mai, 1890).
Il semble que le gisement se situe à l’Ouest de Salvagnac, au lieu dit Pecillou d’après plusieurs étiquettes, l’une notée « Anthracotherium magnum, Gontran près Pecillou, 22 Janvier 1892 » (figuré ci-dessous), l’autre (N° 376) « Anthracotherium magnum. Dent (don de Mr Tisseyre), Pointe Pessillou (près Salvagnac) ».
C’est à Aceratherium albigense que Richard (1946) va attribuer plusieurs dents (molaires et prémolaires) présents dans les collections de la Faculté des Sciences de Lyon, vraisemblablement récupérées par Fréderic Roman.
Richard (1946) et Astre (1964) situent le gisement dans le Stampien supérieur. Son âge semble sensiblement le même que celui de la Sauzière-Saint-Jean, Chattien inférieur, biozone MP 25.
Montgaillard - Garbillot-Bas
Ce gisement totalement inédit est révélé par une étiquette de la collection Caraven-Cachin du musée d’Albi, a fourni « un radius et un cubitus d’Anthacotherium magnum. Don de Hippolyte Bonnefous, le 21 juin 1902 ».
Son âge doit être identique à celui de Salvagnac et celui de la Sauzière.
Faune récoltée par H. Bonnefous à Garbillot-bas. Collection du Musée d'Albi
Montclar-de-Quercy Haut (MP 25-26)
Caraven-Cachin (1898) signalait « Anthracotherium magnum, crocodiles et tortues indéterminées » dans les « marnes de Montclar », sans donner la localisation précise du gisement.
Blayac qui lève la carte géologique de Montauban au 1/80 000 « note quelques gisements de vertébrés, particulièrement dans les tuileries de Montclar-de-Quercy et évoque la découverte de « grandes tortues » (Blayac, 1898-99).
Richard (1931) cite Anthracotherium minimum « selon Blayac », mais dans son inventaire de 1946 n’évoque plus la localité de Montclar-de-Quercy.
Astre (1954) est donc le premier a fournir l’inventaire des faunes du « terrier » de la tuilerie de Montclar où il cite : Aceratherium albigense, Aceratherium lemanense, Dremotherium nanum, le rongeur Theridomys gregarius, et des fragments de plaques de tortues Tryonichides.
Ces faunes, appartenant à la collection de Géologie de l’Université de Toulouse, seront révisées par F. Duranthon en même temps que de nouvelles récoltes sont effectuées par Ph. Olivier.
La liste des espèces sera la suivante : Protaceratherium (= Molassitherium) albigense, Blainvillimys blanvillei, Neurogymnurus cayluxi, Bachiterium curtum. Toutes indiquent la Biozone MP 25 du Chattien inférieur (Muratet et al., 1992 ; Muratet et Cavelier, 1992).
Becker et al. (2013) attribuent plus tard le "M. albigense" à leur espèce nouvelle Molassitherium delemontense.
Leur gangue carbonaté permet d'affirmer que ces fossiles proviennent d’un niveau calcaire situé au toit de la carrière, placées, selon Muratet et Cavelier (1992) entre les épisodes des calcaires de Cordes et de Donnazac.
Le niveau est classé Biozone MP 25-26 par Astruc et al. (2003).
Montclar-de-Quercy Bas (MP 22)
Une autre association est récoltée par Muratet et al. (1992), cette fois au bas de la carrière, avec Hyaenodon exigus, Pseudoltinomys major, qui situent ce niveau dans le Rupélien inférieur, Biozone MP 22.
Cet âge est confirmé par Astruc et al. (2003).
Puycelci (MP 26)
Le gisement de Puycelci récemment décrit par Astruc et al. (2003), se situe au Sud-Ouest du dôme de la Grésigne dans un faciès de grès chenalisé développé au sommet des faciès molassiques, ici peu épais, qui reposent en discordance sur les calcaires du Jurassique moyen du dôme de Puycelci.
Coupe interprétative de l'affleurement du gisement de Puycelci d'après Astruc et. al. (2003). a : calcaires du Jurassique ; b : molasses oligocènes ; c : galets et graviers ; d : argiles brunes ; e : grès fossilifère.
La faune usée et souvent incomplète, est extraite à l’attaque acide ménagée, de blocs exhumés par les labours. Elle y est cependant riche et diversifiée et son inventaire exhaustif est donné, en annexe, par Astruc et al. (2003), avec figures et planches.
Avec des dents de poissons, de crocodiles et de Squamates, il compte de nombreuses dents de rongeurs (Issiodoromys pauffiensis), de Marsupiaux et d’Artiodactyles (Metriotherium cf. sarelense SUDRE).
L’ensemble évoque assez clairement la Biozone MP 26 du Chattien inférieur. Ce gisement est d’autant plus important qu’il se place au niveau d’une zone présumé lacunaire dans le bassin molassique selon les conceptions de Muratet et Cavelier (1992).
Espèces figurés du gisement :
Crocodile indéterminé. Astruc et al. (2003), fig.9-10
cf. Pseudeumeces sp. Astruc et al. (2003), fig. 11
cf. Bransateryx sp. Astruc et al. (2003), fig. 12
Issiodoromys pauffiensis VIANEY-LIAUX. Astruc et al. (2003), fig. 14.1-3
Issiodoromys minor (SCHLOSSER). Astruc et al. (2003), fig. 14-4, 5
Eomys zitteli (SCHLOSSER). Astruc et al. (2003), fig. 14.6
Heterocricetodon hausi ENGESSER. Astruc et al. (2003), fig. 14.7, 8
Gliravus bruijni HUGUENEY. Astruc et al. (2003), fig. 14.9-11
Espèce nouvelle du gisement
Metriotherium cf sarelense (M1-2/g.) (fig. 16) de M. sarelense nov. sp. Sudre in Astruc et al. (2003), fig. 17-18.
Belpuech (MP 27 et plus)
Le niveau fossilifère, signalé par Muratet et Cavelier (1992), se situe dans la vallée du ruisseau de Sivens, dans un chenal conglomératique, puis gréseux.
Il a fourni une molaire de Dremotherium sp., qui d’après Sudre, ne serait pas plus ancienne que la Biozone MP 27. D’après Muratet et Cavelier (1992), ce niveau relèverait de l’épisode inférieur des Calcaires de Donnazac. Pour Astruc et al. (2003, p. 635), leur âge devrait être plus récent.
Tauriac (MP 27 ou plus)
On doit à Caraven-Cachin (1898, p. 408) la première citation, « dans les sables et grès de Tauriac », de plusieurs fossiles : « Anchitherium aurelianense, Anthracotherium magnum et Dremotherium feigouxi (Don de M. De Viviès, 1883) ».
Ces fossiles ont été revue par Stehlin (1906, p. 665) dans les collections du Musée d’Albi qui y a identifié Metriotherium mirabile (fragment de mandibule avec P3-P4, n° 382) et Dremotherium sp. (molaires inférieures). Cette détermination est reprise par Richard (1946).
Le niveau fossilifère situé vers 200 m d'altitude est attribué par Stehlin (1906) et Richard (1946) au Stampien supérieur. Muratet et Cavelier (1992) estiment qu’il se situe à un niveau correspondant au Calcaire supérieur de Donnazac et que cette association n’est connue que dans la Biozone MP 27 du Chattien inférieur. D’après Astruc et al. (2003, p. 635) cet âge reposerait « sur une base insuffisante et en partie erronée. Elle semble devoir être plus récente » (MP 28-29 ?).
Les molasses des environs de Tauriac
Réal - Roquemaure
Le gisement de Réal se rattache à l’épisode sédimentaire le plus récent des molasses tarnaises.
On trouve la première citation du gisement de Roquemaure dans un rapport de 1867 sur l'attribution des Médailles d'encouragement de l'Académie des Sciences de Toulouse, qui signale que le « collectionneur intelligent, M. Jaybert » a adressé à l'Académie des ossements provenant du " terrain de molasse qui continue les couches miocéniques de la Haute-Garonne » et qu'il est ainsi recompensé d'une médaille d'argent. Ces restes « n'ont permis à notre savant confrère Noulet que des déterminations génériques qui se sont trouvées d'accord avec celles données par M. Ed. Lartet » (Dremotherium, Amphitragulus, un petit Anthracotherium, un Hyaenodon... "
M. Jaybert « propriétaire des lieux » aurait aussi communiqué à Filhol des portions de maxillaires et des dents de Coenotherium commune et de Lophiomeryx chalaniati, fossiles qui lui « paraissent contemporains des sables de Fontainebleau » (1878, 1881).
A la même période M. Jaybert donne plusieurs « dents molaires d’Amphitragulus et divers ossements du même animal » à la Commission des Antiquités de Castres (Paul de Casteras, 1879, p. 174).
Paysage molassique aux environs de Réal
Le point fossilifère indiqué par la carte géologique, se trouve un peu au Nord du village, à une altitude d'environ 210 m. Il a aurait été découvert au cours du forage d'un puits. Il est successivement cité par Cabié (1893), Caraven-Cachin (1898), puis Répelin (1899).
Mais c’est la collection du Muséum de Toulouse qui renferme le plus d’échantillons de ce gisement, encore à ce jour répertoriés, dans la collection Noulet, sous les noms d'Amphitragulus feningrei (ns° 2011.0.8, 09, 31) et A. elegans (n° 2013.0.260).
Richard (1931, 1946) qui en a révisé les faunes, identifie :
Microbunodon minimum (une M3 supérieure, un fragment de mandibule, quelques os) ;
Dremotherium nanum (fragments de mandibules et dents isolées) ;
Dremotherium tolosanum (une molaire inférieure).
Le muséum de Paris renferme aussi quelques éléments qui ont suivi Filhol dans son affectation : une astragale d’Aceratherium sp., des dents et ossements de Dremotherium nanum. Cette association « l’incite à placer le gisement de Réal dans la partie supérieure du Stampien ».
Jéhenne (1985), dans sa révision, montre que Microbunodon minimum y est associé à Dremotherium guthi et à D. quercii, et que l’on peut attribuer le gisement à l’intervalle Biozone MP 29-30, conformément à la présence du gastéropode Wenzia ramondi dans les assises carbonatées subordonnées (Répelin, 1899).
Garridou - Roquemaure
Cabié nous informe (1893, note infra-paginale, p. 23) qu’il possède des fragments de mâchoire qui ont été mis à jour, vers 1875, à Garridou, tout près de la limite ouest de Roquemaure. Ces débris étaient placés dans une couche de marne, vers 150 m d’altitude, niveau sensiblement inférieur à celui de Réal ».
Ecailles de tortues trouvées par A. Caraven-Cachin dans les grès de la Sauzière-Saint-Jean
(collection du Musée d'Albi)